VENDREDI 2 OCTOBRE 2015 à 9h30 au Département de recherche ENSA Paris la Villette, 118 avenue Jean Jaurès. 75019 Paris
TITRE: De la part de « recherchés » PDF
«Je n’aime pas la recherche quand elle n’est utile qu’à ceux qui la font. Je pense qu’il importe de le dire aujourd’hui, au moment où la recherche a recommencé enfin à aborder des questions « sociales » et qu’elle est de nouveau menée « sur le terrain ». Mais il arrive encore trop souvent que de jeunes chercheurs (qu’il soient des philosophes, des architectes ou des urbanistes) se déguisent en ethnologues et qu’ils demandent aux « autochtones » de leur faire cadeau de leur temps, de leurs histoires et de leurs idées pour ensuite s’en aller. Ils rentrent chez eux pour rédiger une thèse que souvent personne ne lira, sauf les membres du jury universitaire. Rien de tout cela ne me paraît utile pour le territoire et pour les personnes étudiées, pour ce que j’appelle les « recherchés ». Certains chercheurs écrivent que leur présence sur le terrain peut servir à déclencher des processus. Plus j’avance et plus je trouve cette expression prétentieuse, creuse et fausse. Il est très difficile de mettre en oeuvre des processus réels et durables. Souvent la recherche s’achève avec les photos d’un banquet ou d’une rencontre qui resteront sans suite. Il me paraît donc plus honnête de se présenter comme les explorateurs désirants de processus en devenir, de participer à un processus en cours et de l’alimenter par notre propre énergie. Si le processus est déjà en cours, il se poursuivra même après notre sortie du terrain de jeu. Et c’est justement ici, dans la sortie du terrain, que l’on peut mesurer la qualité territoriale et politique de la recherche, sa puissance de transformation. La phase la plus importante de la recherche est celle de sa reterritorialisation : comment, où et quand communiquer ce que nous avons compris. Trouver les langages qui conviennent pour transmettre aux « recherchés » les résultats de notre recherche : voici le point fondamental à mes yeux.»
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